Le pays perdu
Dessinateur : Espe
Scénariste : Stéphane Piatzszek
Coloriste : Aretha Battitusta
Editeur: Glenat
Un jeune trader décide de passer sa semaine annuelle de congé dans un hôpital, une manière pour lui de se détacher de son gsm mais aussi de tous les médicaments qui le tiennent éveillé et « performant » dans son job. La première nuit, il rencontre son voisin de chambrée, un vieil homme, qui lui raconte son histoire…
Juin 1940 : l’Alsace est occupée par les allemands. A Colmar, les Engel constituent une famille sans histoire. Vigneronne depuis des générations, elle produit l’un des meilleurs crus de la région. Mais la guerre va bousculer cette douce quiétude…
Alfred le père, dirige l'exploitation,. Un de ses fils, Antoine, est parti se battre pour l’armée française et a été fait prisonnier, la famille cherche à le localiser. Lorsqu’elle le retrouve et qu’il peut rentrer à la résidence familiale, celui-ci est marqué par ce qu’il a vécu et se réfugie dans le travail d’une vigne isolée…
Sa fille, Fina donne cours dans un lycée , elle fait la visite aux prisonniers mais va progressivement s’investir dans la résistance avec son prétendant nommé Henri.
Le plus jeune, François, est encore à l’école, il va subir l’influence d’un professeur très stratégique qui va le convaincre d’adhérer progressivement aux valeurs nazies au point de vouloir s’engager pour les jeunesses hitlériennes…
Les choses se gâtent lorsque les allemands viennent saisir du vin de l’exploitation pour en faire de l’antigel et versent du mazout dans les tonneaux ancestraux pour les rendre impropres à la consommation, empêchant par cette manière de produire du bon vin dans le futur. Alfred se rebelle et blesse un allemand. Il est emmené au poste sous le regard moqueur de son fils…
Le voisin de chambrée qui a fait tout ce récit est en fait François, il semble avoir des projets pour ce courtier en phase de repos mais lesquels ?
Apparemment, il n’y a pas que Corbeyran qui est tombé dans le tonneau de vin lorsqu’il était petit (comme en démontrent ses multiples variations scénaristiques sur le vin). Son complice dans le dessin pour Châteaux Bordeaux, Espe, semble avoir attrapé le même virus vinicole, se plongeant dans une famille de vignerons alsaciens. L’intrigue est cependant beaucoup plus large et la trame de fond est davantage le contexte de l’occupation allemande qui vient chambouler (une fois de plus !) cette paisible région vinicole.
Prendre le regard spécifique de l’Alsace pour décrire une approche historique est plutôt une idée originale et permet de décrire une population partagée entre sa double identité, selon les sensibilités de chacun en lui apportant un trait particulier, un regard neuf ou un traitement spécifique qui permet au lecteur de rentrer vraiment dans l’histoire (et dans l’Histoire). On peut imaginer facilement que de nombreuses familles ont pu être divisées comme les Engel.
C’est peut-être cependant là que se trouve la faiblesse de ce nouveau récit. Car malgré ce contexte original et si le scénario est correct et le dessin de qualité, il manque pour le moment ce petit "plus" qui fait qu’on va vraiment accrocher et se passionner pour cette famille. Peut-être est-ce lié au premier tome qui a pour objectif davantage de planter les personnages et le contexte mais c’est vrai que personnellement, je n’ai pas accroché tout de suite. Pourtant, j’adore ces intrigues qui font découvrir un contexte historique de manière à la fois ludique et instructive.
Je reste donc avec un petit goût de trop peu après avoir lu ce premier opus mais en même temps je suis impatient de lire le tome 2 car je suis curieux de voir si les auteurs vont pouvoir vraiment faire décoller ce récit. Donc, je croise les doigts pour que cette série parvienne à me faire vraiment entrer dans le récit lors des prochains épisodes car il ne faut pas grand-chose pour passer d’un vin alsacien moyen à un plus grand cru !