Série: Rimbaud, les grands peintres
Auteurs: Thomas Verguet , Philippe Thirault, Céline Labriet
Editeur BD: Glenat
Une chronique BD: Génération BD
Marseille, début novembre 1891, Arthur Rimbaud est au plus mal. On l’a amputé de la jambe pour éviter une infection mais son corps gangréné va le lâcher définitivement le 10 novembre. L’artiste avait 37 ans.
Dans ses dernières volontés, Rimbaud demande que soit versée une partie non négligeable de son héritage à l’un de ses serviteurs nommé Djami Wadaï, qui réside en Abyssinie.
La sœur de Rimbaud va y envoyer un ami d’enfance de son frère, Valentin Bracq, sur les traces du poète, à la recherche de ce serviteur mais également à la recherche de poèmes qui seraient restés dans ce pays.
C’est donc dans un parcours initiatique que Bracq va se lancer, s’imprégnant de la culture abyssinienne et se confrontant à la rugosité de ses habitants. Bracq va s’enfoncer toujours plus loin dans des contrées toujours plus éloignées, recherchant les traces de Rimbaud . Avec quelques mois (années) de décalages, il va revivre ce qui avait subjugué son mentor, découvrir son commerce un peu particulier mais aussi comment le poète va s’immerger dans les espaces à la grandeur de la démesure de son œuvre et de au point de s’y perdre.
Si la renommée littéraire de Rimbaud n’est pas à faire, la dimension de l’homme explorateur est par contre beaucoup moins connue. Rimbaud a beaucoup écrit au début de sa vie mais cela s’est quelque peu estompé au fur et à mesure que cette démarche de s’enfoncer vers des terres étrangères va lui venir progressivement. Son intérêt pour l’Abyssinie (ex-Ethiopie) ne lui arrivant que les dix dernières années de sa vie.
C’est sur cette démarche que la série Explora de Glénat fonde fort légitimement son approche. Dans un parcours souvent fort poétique (au détriment peut-être d’un certain réalisme), on s’immerge à la manière de Bracq et de Rimbaud dans des contrées totalement dépaysantes.
Lorsqu’on referme le livre, on se dit que l’auteur est décédé à 37 ans mais qu’il avait déjà vécu bien davantage de choses que nous ne vivrons dans toute notre existence, ses périples n’ont pas arrangé ses problèmes de santé mais il aura vécu sa vie avec la même intensité que ses écrits et c’est peut-être là le message de cette bande dessinée.
Pour montrer son intensité, je vous offre en bonus le texte « Sensation » écrit par l’écrivain :
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, - heureux comme avec une femme.