Irish melody
Dessinateur : Willy Lambil
Scénariste : Kris
Storyboard : Emmanuel Michalak
Editeur: Dupuis
Mon avis:
Premier album des Tuniques bleues depuis le décès de Cauvin il y a un an déjà…
Certes l’album 65 sans Cauvin ni Lambil est paru en 2020, un bel album des Beka et dessiné par le talentueux Munuera. Puis le tome 64 « Où est donc Arabesque » du duo Cauvin/Lambil en 2021, mais ce 66ème épisode est le premier de Lambil sans Cauvin. C’est le scénariste Kris (Un homme est mort, Notre Mère la guerre, Notre Amérique…) qui a eu la rude tâche de succéder à Raoul Cauvin. Bien que Lambil et Dupuis aient annoncé que plusieurs scénaristes pourraient être choisis selon les épisodes…
Kris a repris les codes précédemment utilisés par Cauvin pour élaborer son histoire, avec les disputes et chamailleries entre Blutch et Chesterfield (Yék yék yék), le personnage de Stark, et toujours aussi inspiré d’une réalité historique. Avec cette fois des Irlandais car nombre d’entre eux ont servi dans les armées confédérées et de l’Union. Et Kris a imaginé que Cornelius Chesterfield serait un cousin irlandais, ce qui sous sa chevelure rousse reste plausible… L’occasion aussi pour Kris de développer son goût pour l’Irlande (on lui doit déjà « Coupures irlandaises » et « Partitions irlandaises »).
L’album est aussi intégré entièrement sur le plan des pages de garde puisque situé précisément sur la carte.
Bref une continuité dans le style, avec néanmoins quelques ajouts comme le parallèle entre l’état-major des Nordistes et des Sudistes : Stilman et ses commentaires habituels est ici remplacé par un officier sudiste qui fait ses commentaires après les directives du commandant. En page 37 on peut y lire une critique acerbe sur cette guerre de sécession dans laquelle on se tire dessus entre frères ; l’esprit antimilitariste subsiste chez Kris après Cauvin… Kris y inclut aussi plus d’émotion entre Blutch et Chesterfield, entre les Irlandais combattants dans chaque camp… tout en conservant de l’humour bien entendu.
Au dessin, Lambil (86 ans au compteur !) fait le job bien que, tout comme déjà dans son précédent album, j’ai trouvé que les différences entre Blutch et Chesterfield soient moins marquées, avec un Blutch plus rondouillard (même en page de couverture) et aussi parfois quelques soucis de proportions entre les personnages qui se tiennent debout. C’est d’autant plus flagrant lorsque l’on compare avec les dessins de fin d’album et de 4ème de couverture réalisés précédemment… Mais on lui pardonnera et on sent aussi qu’il reste toutefois très à l’aise avec les chevaux et les animaux qu’il s’amuse toujours à placer en avant plan de décors pour certaines cases aérant le récit.
Demande de Lambil ou idée de Kris, j’ai aussi trouvé des ambiances fort différentes dans cet album, permettant de recréer l’univers de plusieurs albums précédents. Ainsi je pense notamment à Chesterfield dans la boue (Bleus dans la gadoue), le passage dans le bar (Blue Rétro), les bateaux (Bleus de la marine), dans un décor enneigé (Les cousins d’en face) …
Signalons enfin que c’est Michalak qui a réalisé les storyboard car ce n’est pas la méthode de travail habituelle de Kris, mais Lambil a demandé de travailler de la même façon que Cauvin qui lui donnait un storyboard crayonné…
Maroulf