BD Classic

À la création de "Boule & Bill" par Jean Roba en 1959, nul n'aurait pu imaginer, 60 ans plus tard, que les aventures de ce petit garçon en t-shirt jaune et salopette et de son cocker seraient toujours au firmament et continueraient de faire rire petits et grands. Dans le cadre des 60 ans de "Boule & Bill", Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault retracent le parcours de l'un des plus grands auteurs de la bande dessinée franco-belge.

Ce livre sera accompagné de magnifiques illustrations (planches et aquarelles) qui révèlent l'incroyable richesse et toute la poésie de l'univers de Jean Roba.

Ce qu’on en a pensé…

La période des fêtes de fin d’année est toujours propice à l’arrivée de ce type d’ouvrage de luxe.  Les éditions Dargaud confirment donc ce chouette rendez-vous en nous sortant ce livre, signé par une des plus belles plumes sur ce type d’exercices : Bertrand Pissavy-Yvernault et son épouse Christelle.

Ce couple d’historiens du IXème Art a déjà commis des ouvrages similaires d’excellente facture : on pense notamment aux fantastiques 2 premiers volets de leur « Véritable Histoire de Spirou » ou du travail du couple sur nombre d’intégrales actuelles (la réalisation d'un album inédit de Boule et Bill par Roba et Delporte, chez Dupuis (L'avis de chien), la refonte de la collection Boule et Bill chez Dupuis (nouvelles couvertures), une monographie consacrée à Willy Lambil, chez Dupuis (avril 2020) et l'intégrale Tif et Tondu 4 (janvier 2020)...).

Pour moi, Jean Roba a toujours été un auteur injustement sous-médiatisé.  Son caractère discret, replié sur sa tribu mais pouvant être affable cependant, n’a certes pas aidé.  Pourtant comment se fait-il qu’un tel génie du crayon n’a-t-il jamais eu droit à des intégrales du style VO de Spirou, ou de Gaston où même des éditions de luxe des Astérix ?!?  Totalement incompréhensible à mes yeux d’amateur éclairé du franco-belge !

Pour l’heure donc, les éditions Dargaud nous présentent ce superbe recueil conciliant iconographie et bavardages entre l’auteur et différents intervenants.

D’autre part, on saluera aussi le travail impeccable de mise en pages de Philippe Ghielmetti : « c’est l’association du diamant brut avec sa bague ciselée qui transcende l’objet en bijou ! ».

Avec donc cette étroite imbrication entre les textes de Bertrand Pissavy-Yvernault et cet accompagnement graphique fin, on se plait à tourner les nombreuses pages de cet ouvrage, s’arrêtant tantôt sur une magnifique reproduction de planche (mais quel orfèvre ce Roba !), tantôt sur une citation…

Ainsi, en exemple, je reprendrai cette citation, datant de 1978 : « Pour créer un gag, j’utilise le procédé de l’analogie, disons la maman : « elle part pour se rendre chez le coiffeur.  Elle amène Bill… Qu’est-ce qui peut lui arriver là-bas ? », et voilà.  Ou je prends une situation, et si ça ne marche pas, je cherche plus fort… Si ça ne marche pas encore, je change de situation.  Ordinairement, je trouve la chute avant le début. »

On apprend véritablement énormément de choses sur la vie de Roba : son enfance heureuse est passée au crible, on apprend qu’il a fallu du temps pour qu’il puisse imposer ses personnages auprès de Charles Dupuis ; heureusement qu’il pouvait compter sur ses amis Franquin et Rosy, alors pierres angulaires de la maison !

Au gré donc de ses pages, on suit aussi l’évolution au sein du journal Spirou de l’auteur, de la création de son mini-récit « Boule contre les mini-requins » à la présence hebdomadaire du facétieux duo dans les pages du journal jusqu’à son apogée en 1969, lorsque la série atteignit le sommet du référendum annuel, devançant par la même Franquin (et la mésaventure qui s’en suivi est absolument truculente !)

Saviez-vous aussi qu’en véritable amoureux de la race des Cockers, Jean Roba en eut 7, dont évidement Bill fut le premier de la série ?

Cet ouvrage fourmille d’anecdotes très souvent drôles, attendrissantes, coquaces, mais aussi parfois plus graves (la perte de son épouse ou son envie que ses personnages vivent après lui)….

 

 

Deux derniers mots, annexes à ce livre, mais que l’amoureux de l’œuvre et l’enfant des années ’70 ne peut laisser sous silence :

• Aujourd’hui, c’est-à-dire vendredi 08 novembre 2019, sort le 40^ème album de Boule & Bill. Il y a 4 ans, Bastide et Cazenove reprenaient la série des mains de Laurent Verron, qui la tenait lui-même de Roba.  Amoureux de l’œuvre de Roba, n’ayez crainte : ce nouveau duo a réussi l’exploit de ne pas dénaturer l’œuvre originelle ; si vous avez encore des craintes à ce sujet et que vous n’osez ouvrir un de leur tome, osez !  Vous risqueriez d’être quelque peu surpris !

• Faisant partie de la génération Goldorak, il existait d’autres dessins animés qui ont pu marquer le jeune téléspectateur de l’époque ; pour moi, ce fut notamment la série de 26 petits dessins animés mettant en scène…. Boule & Bill ! Scénarisée par Roba (évidemment), ils furent réalisés par un certain … Raymond Goossens.
  Et c’est aujourd’hui que j’apprends que l’auteur n’avait qu’une envie à son propos : « Oublier cette triste expérience et ne plus en parler ! » Sic… mon cœur saigne
  Magie des archives d’Internet, cliquez donc >> ici << pour (ré)écouter et (re)voir ce splendide générique d’alors….

C’est donc avec un sentiment de plaisir nostalgique mais bienveillant que je referme ce superbe livre et cette chronique.  Merci Monsieur et Madame Pissavy-Yvernault ainsi que Monsieur Ghielmetti : grâce à votre fantastique travail, l’enfant qui est toujours en moi a pu ressurgir durant quelques instants… et ça fait du bien !

 

En bonus, et uniquement pour le plaisir des yeux…

Le dessinateur et sa muse... Roba et Bill !

 

Milan Morales