Un peu d’histoire… (par l’éditeur)

Publié dans le magazine Comic Ryu de l'éditeur Tokumo Shôten, Chroniques de la mariée de Bretagne est un manga historique qui se déroule au cœur de la Bretagne du 13^ème siècle.

Dès le début du siècle, la Bretagne fut un enjeu entre les Capétiens et les Plantogenêts. 
Jean ssns Terre avait besoin de la Bretagne pour garantir la liaison entre son royaume d'Angleterre et son duché d'Aquitaine. Philippe Auguste l'avait parfaitement compris et avait appuyé la révolte du neveu de Jean sans Terre, Arthur, duc de Bretagne.

En 1212, alors que la Bretagne échappe encore à l'autorité de la royauté, car trop éloignée de Paris, Philippe Auguste décide qu'Alix de Thouars épouserait Pierte Mauclerc, duc de Dreux et cousin du roi, pour s'assurer la fidélité du duché. 
Devenu Pierre 1^er de Bretagne, ce dernier voulut affermir son pouvoir et étendre son domaine. Il s'attaqua d'abord aux grands seigneurs bretons, s'emparant ainsi d'une partie des biens d'Henri de Penthièvre, soit le Penthièvre et la Trégor. Dès son avènement, il se heurta à la puissance des évêques bretons qui détenaient les clés des grandes cités du duché.

Son mariage avec Alix, l'héritière des Plantogenêts, a marqué durant plus de deux décennies la Bretagne, mais aussi le paysage politique français du 13^ème siècle. 

Le duché de Bretagne ne sera pas épargné par les luttes de pouvoirs intestines : conflits territoriaux entre la France et l'Angleterre, jeux politiques au sein des héritiers de la dynastie des Plantagenêts, oppositions religieuses entre catholiques et protestants... La moindre étincelle menace d'enflammer la région, et les ducs ne voient pas tous d'un mauvais œil l'idée de défier la couronne de France...

C'est cette période clé de l'histoire de la Bretagne que le jeune et talentueux mangaka Junji Takehara a choisi d'exploiter comme décor pour son manga. Une comédie romantique qui fera de ses protagonistes des témoins - et parfois des acteurs - des tumultes de l'Histoire de l'Armorique. Un véritable manga d'aventure au sens noble du terme.

L’histoire de ce livre 1, en quelques lignes…       

André Le Bleau devrait être un seigneur heureux : dans quelques jours, il recevra  une proposition de son vieil ami Messire Raoul de Dinan, de  marier sa fille Andrée au futur Duc de Bretagne.

Dépêché par ce vieux compagnon de bataille, Thomas le héraut* est porteur de cette excellente nouvelle !

Las, si le jeune Thomas retrouvera bien sa trace dans un tournoi à Nantes, sous son armure se dissimulera la future promise, Andrée, qui cherche elle à attenter à la vie du dît-duc !

Et puis, il y a 2 autres légers soucis : 

• le futur promis, l’héritier du Duc n’est encore qu’un nourrisson ;
• et puis le vieil ami André a été rappelé à Dieu, assassiné lui et ses domestiques par de mystérieux bandits.

Voilà qui va singulièrement compliquer la mission de notre jeune héraut, d’autant que la demoiselle n’est pas du genre à s’en laisser conter…

 * « porteur de blason », celui qui est chargé de transmettre les proclamations officielles)

Ce qu’on en a pensé…

Nouveau Seinen lancé par Kurokawa, ce récit a l’avantage de se dérouler durant notre moyen-âge et plus précisément durant le XIIIème siècle, sur les côtes de la belle Bretagne française ! Pourtant, son mangaka Junji Takehara est un parfait Tokyoïte, distant donc de 2070 lieues (10000km) de Brest !  Cet auteur, dont cette série est la première publication, se révèle être un fan absolu de la période médiévale française ; au travers des 4 chapitres de ce 1^er volume, on ressent bien sa passion et le travail de recherche historique qu’il a dû effectuer pour inscrire son histoire dans l’Histoire en veillant à ce que chaque détail soit crédible : prêtez donc un œil sur une planche au hasard, observer le détail des blasons, des robes ou des armures, sur les volutes architecturales des monuments…. Dans le monde du Manga, il est rare d’observer un tel travail sur l’arrière-plan des cases ; tout doit aller vite pour pouvoir soutenir le rythme de parution.  

Par cet aspect représentation historique, « Chroniques de la mariée de Bretagne » nous fait fort penser à « Baltzar, l’Art de la Guerre (Meian Editions), qui pose lui aussi un univers graphique foisonnant et pleinement réaliste.  Du très grand Art, assurément !

Le personnage principal se révèle elle très dynamique, trop d’ailleurs peut-être : Andrée n’a qu’une seule idée en tête : venger son père en tuant le Duc.  Aucun autre sentiment, aucune autre expression ne nous sont révélés, rendant ainsi ce personnage bien trop monobloc que pour avoir des aspérités auxquelles s’accrocher.  Heureusement, son compagnon de voyage a lui bien plus de failles et de compétences : s’il est certes un grand naïf peu enclin à manier l’épée, il est aussi et surtout doté d’une singulière volonté de découvrir la Vérité en usant de ses talents d’enquêteur et de négociateur.

L’histoire est donc promptement mise en place, et lance ces 2 protagonistes dans une enquête pour résoudre le meurtre d’André le Bleau.

A suivre prestement dans le livre second, qui sera sur les étals de nos libraires début Juillet 2024.

Milan Morales