J'ai adopté ce format particulier pour plusieurs raisons, je sais que mes fidèles lecteurs aiment avoir tous mes albums les uns à côté des autres et comme je me trouvais dans un récit au format à l’italienne - parce que dessiné sur appli - j’ai conçu ce coffret qui fait la taille habituelle de mes albums, avec deux albums, premier miracle de la bible qui permet de doubler mon tirage ! C’était complexe à imprimer le coffret, je ne voulais pas d’un truc chinois, mais après des recherches un imprimeur français a été trouvé, avec ce système de monocuvette. Cela fait un objet élégant, pour un prix – 96 pages par bouquin – 14,95 €, une prouesse technique pour un prix raisonnable. J’insiste auprès de mon éditeur pour rester dans des tranches de prix qui restent populaires parce que le Chat est un personnage toutes catégories sociales confondues, pour les fortunés, les gens normaux, les jeunes… Dans mes lecteurs, j’ai des philosophes ou des profs d’université très exigeants intellectuellement qui me disent que c’est formidable mais j’ai aussi le serrurier ou le flic du quartier qui adore !

Ce qui est important pour moi c’est que ce soit perçu de la même manière, c’est-à-dire que l’intellectuel pointu n’y trouve pas plus de choses que la crémière du quartier, parler à tout le monde de la même manière.
 La bible selon le Chat, c’est venu comme ça, d’un gag en me disant que j’allais raconter la genèse et puis j’ai mi Dieu qui crée le monde, non le Chat… euh… je confonds dieu et le chat… je me suis pris au jeu, la bible c’est trop bien, une bonne histoire au départ, un scénario assez solide, un succès de librairie. Donc je ne fais que me raccrocher à cet engouement mais en portant une version réfléchie alors que la première version avait été faite dans la précipitation des premiers temps. Je reste dans l’ancien testament et je demande de ne pas révéler la fin qui est assez surprendre, quand Dieu vient sonner à ma porte. On est dans la schizophrénie : dieu crée celui qui va le créer donc le chat crée son créateur. On n’est pas loin de ce qui s’est passé avec les divinités à travers toutes les civilisations. Certains prétendent que dieu nous a crée et  d’autres prétendent que nous avons créé dieu. Moi j’ai tout mis dans une image !
 On est en plein dans la problématique actuelle que je traite dans mon livre « Peut-on rire de tout ? » qui sort chez Lattès. Chapitre après chapitre je traite des religions, des vieux, des malades etc. 

Actuellement, pour ne pas risquer de choquer on rabote le propos et moi je trouve intéressant d’affirmer qu’il n’est pas question qu’on bride la liberté d’expression, un droit acquis de longue lutte par nos prédécesseurs dans nos pays et je n’ai pas envie que cette liberté recule face au dogmatisme de toute part. Chaque fois on se rend compte que ce n’est pas acquis une fois pour toutes et qu’il faut continuer à proclamer haut et fort que toute opinion, tant que ce que j’exprime ne nuit pas aux autres et ne bride pas leur liberté fondamentale, je peux l’exprimer.

Je ne suis pas contre toute censure car elle est nécessaire dans le cadre de la loi, lorsqu’on exprime des propos racistes, des appels à la haine, il faut sévir, il y a un appareil judiciaire qui permet de se battre contre les propos inadmissibles mais tant qu’on reste dans l’expression d’une opinion même si elle est dérangeante, humoristique, insolente cela fait partie de la liberté d’expression.

C’est sûr que cela peut choquer des gens qui estiment qu’on ne peut pas rire de dieu. Je respecte la foi, je ne vais pas mettre des coussins petteurs dans les églises, je ne vais pas être intrusif dans la vie spirituelle de mes contemporains mais si quelqu’un me dit que dieu existe je peux considérer que c’est une offense à mon athéisme et j’ai le droit de dire que dieu n’existe pas ce qui est peut-être une offense pour l’autre, un prêté pour un rendu.

La bible selon le Chat, c’est un petit peu se foutre de la gueule de ce qu’on a essayé de nous faire croire en gros, ces notions de la religion dont certaines sont magnifiques parce qu’elle structure notre société, rassure ses sujets, soumet des règles de vie mais qui ne sont pas spécialement religieuses, mais si on te dit que tu iras brûler en enfer, quelle menace, quel traumatisme pour des braves gens, quel empêchement de vivre de façon épanouie !
C’est inadmissible de terroriser comme cela mais dés qu’on est plus réfléchi on se rend compte que c’est du pipeau, comme le père Noël.

Je ne prévois rien, je n’ai pas de plan de carrière, je ne sais pas ce que je ferai dans deux ou trois ans, le Chat ne paraît plus nulle part, mais cela ne me manque pas. J’ai encore une certaine pression parce que le Chat existe encore sous d’autres formats (calendriers, agendas, marchandising…) mais je fournis encore un dessin sur les applis gratuites « le chat »… la pression est différente, j’ai voulu me libérer de cette contrainte hebdomadaire, me libérer de rendre tous les vendredis mes planches pour les journaux. 

Je ne travaille pas moins qu’avant mais j’avais envie de casser le moule, c’est toujours cela que j’essaye de faire depuis longtemps comme le jeu du dictionnaire, Ruquier… Je pars avant de devenir la caricature de moi-même, j’ai l’impression que les gens qui restent dans un moule qu’ils ont créé et si cela dure trop, ils tournent en rond.

Quant aux exploits de Scott Leblanc, l’album est bientôt terminé, prêt à paraître en début d’année. Il s’appellera « Terreur sur Saigon » et non, ce n’est pas un des titres que j’avais indiqués sur le quatrième plat des albums précédents, caricatures à la OSS 117. Cela va être une belle histoire… Au départ c’était prévu comme une trilogie mais je ne sais pas si on va en rester à trois…