Batman 80 ans
Editeur: Urban Comics
Batman n'est pas seulement le super-héros le plus iconique, il est également l'un des plus plébiscités par les fans dans le monde entier. Cet ouvrage revient sur l'aventure du personnage mais aussi sur son parcours éditorial au sein de la revue qui l'a vu naître : Detective Comics. De sa première apparition dans le numéro 27 au récent numéro 1000, éditeurs et artistes de renom retracent l'épopée du Chevalier Noir dans un album hommage qui alternent témoignages et pages de bande dessinée.
Mon avis:
Au moment de refermer ce gigantesque album, la pression se fait tout de suite sentir: il va falloir que je donne mon avis maintenant… Qui suis-je pour effleurer du regard 80 années de carrière du plus grand des super-héros?!? La tâche est d’autant plus difficile que ce recueil n’a pas de réel suite logique, c’est plutôt un medley des meilleurs parutions de Detective Comics selon DC Comics.
Je vais commencer par le début, en mai 1939, lorsque Batman fait sa toute première apparition dans le Detective Comics #27. Avant lui, il y avait eu Slam Bradley, Speed Saunders, le Crimson Avenger et bien d’autres, tombés dans l’oubli dans l’ombre du chevalier noir. Il fit tout de suite sensation auprès du public et se fit rapidement la place qu’il mérite.
Ce qui m’a particulièrement frappé, c’est qu’il revient de loin Batman, de très loin même!
Commençons par le dessin qui se limite à dévoiler des scènes très cloisonnées, sans trop de détails et lourdement encrées. La colorisation est basique, en aplats et le choix des teintes est disons « audacieux ». C’est assez naïf, tout comme le scénario! On est vraiment à la naissance de la narration à suspens et le style est encore très maladroit. Ce n’est pas le découpage et le storyboard qui rattraperont le tout, les auteurs se sentent même parfois obligés de poser des flèches pour le sens de lecture lorsqu’ils osent des découpages plus « cavaliers »! C’est amusant. Les intrigues tournent rarement autour d’autre chose que le combat contre la pègre et ça finit presque toujours dans une banque ou un tribunal le tout très vite « torché », tout au plus 6 ou 7 pages. Le comic strip a déjà plus de 30 ans et pourtant, il reste encore tellement de chemin à parcourir!
Pour situer l’époque, cette année au cinéma d’outre-atlantique c’est la sortie du Magicien d’Oz, Autant En Emporte Le Vent, La Chevauchée Fantastique, Tarzan Trouve Un Fils,..
Il est très amusant de voir les premières apparitions de Robin (#38), Harvey Kent Aka Double-Face (#66), Le Sphinx, qui n’est d’ailleurs pas aussi malin que cela au départ (#140), John Jones (#225) qui réapparait récemment dans la série Supergirl à la télévision, Batgirl (#359), Deadshot (#474),…
Parfois, c’est assez navrant aussi de voir comment les idées de scénario peuvent coller avec le machisme de l’époque, comme pour l’apparition de Batwoman (#233, juillet 1953) avec les innombrables clichés de ses accessoires (accrochez-vous): poudre pour aveugler, bracelets-fantaisies-menottes, parfum-lacrymo N°5 (si si), filet à cheveux pour capturer les méchants, à pleurer…
Vous me direz que dans ma liste non-exhaustive de premières venues il y a un grand oubli et je ne peux qu’approuver… En effet le Joker ne fait son apparition dans ce très grand ouvrage qu’en page 403 (des 536 pages) et encore, ce n’est que suggéré, lors de l’accident dans l’usine chimique du #27 the New 52. Il n’y a pas d’explications à cela mais de ce que j’ai pu comprendre, le Joker apparait pour la première fois dans le Batman #1 de 1940, qui n’est donc pas un Detective Comics. Hors ce recueil puise ses sources dans les 1000 numéros de ce magasine. CQFD? De plus, la part belle a été faite au plus connu des ennemis de Batman avec Joker Renaissance sorti en même temps que ce bouquin et dont la chronique est à lire ici si elle vous a échappée. C’est un peu l’année du Joker, pourtant c’est de Batman que l’on fête l’anniversaire, il ne faut pas non plus faire de l’ombre au chevalier de l’ombre…
Rapidement, enfin, toute proportion gardée, un fil conducteur se dégage de tout cela. Et c’est sûrement ce fil qui façonnera le chevalier noir au fur et à mesure des années et qui continuera sans nul doute à faire ce qu’il est à l’avenir. Le traumatisme de la perte de ses parents, sous ses yeux, a créé la soif de vengeance/justice et ce rapport si particulier à la famille, à la collaboration qui rend si ténébreux notre héros. Ce thème revient souvent et de façon différente, c’est très intéressant de voir comme cela continue à inspirer les différents scénaristes qui ont eu l’honneur d’écrire pour Batman.
La sélection de numéros est entre-coupée de story-board d’époque, inédits, de textes et aussi en introduction d’un bref historique sur l’aventure Detective Comics qui montre à quel point les choses peuvent parfois mettre du temps à démarrer! Ce n’est pas toujours gagné d’avance!!!
Une galerie de couvertures alternatives clôture ce magnifique ouvrage à la couverture sombre juste agrémentée d’un vernis du meilleur gout que je ne peux que conseiller à toute personne intéressée par le monde de Batman et avide de connaître un peu mieux ce personnage torturé.
Il est vrai que dans le monde foisonnant des comics, il n’est pas facile de démarrer une série, tant le choix est vaste. Commencer par un spécial anniversaire n’est pas une si mauvaise idée, cela permet de se donner un bon bagage pour oser aborder la suite! Surtout à ce prix, c’est bientôt Noël en passant…