BD Classic

Depuis le rachat de leur maison par la banque pour une somme dérisoire, la famille de Dorothy dit Dusty a été expropriée et loge chez des voisins. La gamine de 10 ans n'en peut plus d'attendre le retour de son père parti depuis déjà six mois manifester à Washington avec ses collègues syndicalistes. De nuit, elle se met en route seule vers Washington dans l’espoir de le retrouver. En chemin, elle fait la connaissance de Béany, un jeune sans abri plutôt débrouillard, et "Bertha wagon à bestiaux" qui n'a pas peur de mettre une bonne raclée aux malfrats qui les importunent dans le train où elles ont sauté pour rejoindre la capitale. Sur le chemin de Washington, Dusty prend le temps de les accompagner à l'élection du roi des Hobos, des marginaux parcourant le pays en toute liberté. Des "élections" doivent avoir lieu pour remplacer l’actuel roi, Steambot Willie, le chouchou de Bertha. Comme il s’agit d’un concours où le roi des Hobos est choisi en fonction de la qualité des histoires qu'il raconte, Dusty qui est plutôt douée dans cette discipline, décide de s’y présenter. Mais c'était sans compter avec l’intervention musclée de la police.  

Mon avis: Une gamine de 10 ans quittant sa famille pendant la Grande Dépression du début des années 30 pour rejoindre son père à Washington annonce une aventure hors du commun. Et c’est bien ce que nous propose Aurélien Ducoudray avec la jeune Dusty et ses diverses rencontres avec autant de personnages charismatiques tout au long d’un chemin parsemé d’embûches qui est l’occasion pour lui d’évoquer quelques figures légendaires comme le couple de criminels Bonnie and Clyde ou les étranges créatures du film Freaks. On comprend bien l’idée de l’ancien reporter de partager sa vision d’une Amérique profonde que la crise a lourdement frappée.

Au dessin, on retrouve Gilles Aris, un auteur que j’ai beaucoup apprécié sur la série "Le Vieux Ferrand" au début des années 2000 avec Christophe Gibelin au scénario. Son dessin souligné par un encrage au trait épais et nerveux est très plaisant et donne immédiatement l’ambiance. Les décors sont bien présents mais sans encombrer des personnages plutôt expressifs qui se détachent parfaitement bien. Les planches sont dynamiques, enchaînant les cases de différentes dimensions et orientations, tantôt étroites et verticales emboîtées dans d’autres horizontales, sans que cela nuise au confort de lecture, au contraire.

La mise en couleurs d’Albertine Ralenti privilégie l’ambiance et est très respectueuse du dessin de Gilles Aris. Une aventure sympathique sur fond historique prévue en deux tomes.