Volume 1
♥ Coup de coeur ♥
♥ Coup de coeur ♥
Série: SOS Bonheur - Saison 2 #1
Auteurs: Griffo, Stephen Desberg, Florent Daniel
Editeur BD: Dupuis
Une chronique BD: Génération BD
Mon avis
SOS Bonheur, sorti en 1988 en album déjà (et en 1984 dans Spirou) ! Une bande dessinée culte pour moi ! Grosse claque que j’avais prise à la lecture de cette bande dessinée en trois tomes, résultats des œuvres de Jean van Hamme et de Griffo. Un concept relativement simple à la base, 6 histoires courtes dans les deux premiers albums, apparemment sans lien direct, et la réunification complète dans le troisième et dernier tome. Splendide dystopie! Une référence que tout amateur de bande dessinée se doit de posséder dans sa bibliothèque ! Certes le propos est noir, pessimiste, dans un état de non droit où les libertés individuelles sont restreintes, où la surveillance est permanente (1984 de Orwell), l’accès aux soins de santé limité et restreint à une élite disposant des moyens suffisants, bref une société dans laquelle les notions de partage, de caisse sociale et de partage sont quasi totalement inexistants ! L’ordre doit régner en Maître et à forces de contrôle, dans le but que tous respectent la norme imposée pour que le plus grand nombre puisse atteindre le bonheur théorique.
Bref, la sortie 30 ans plus tard d’une suite ne pouvait pas me laisser indifférent.
Pourquoi d’abord avoir repris cette série culte ? Car 30 ans plus tard, même si la société a évolué force est de constater que les dérives sont toujours présentes. La pollution, les migrants, les codes moraux et la religion…
Jean Van Hamme a laissé la plume à Desberg, tout en préfaçant néanmoins l’ouvrage, et Griffo assure la continuité au crayon.
Dans ce premier tome de 128 pages pour six chapitres, six histoires courtes nous présentent encore une fois les dérives d’une société trop réglementée. Et un petit épilogue de cinq pages où l’on retrouve les noms et photos des différents protagonistes pour amorcer le tome suivant !
Desberg a bien respecté le job, restant dans les carcans établis à l’époque par Jean Van Hamme et nous fournissant quelques dialogues savoureux, repris en italique dans ce qui suit. Tout comme Van Hamme il a su vraiment nous plonger dans les dérives d’une société pas toujours si éloignée que l’image qu’il en donne…
Dans le premier récit, les forces du maintien de l’ordre matrimonial surveillent tous les couples pour éviter les liaisons et rencontres dans les lieux publics, réduisant les risques qui pourraient mener à un divorce, ce dernier étant maintenant interdit.
Second récit. Laziza habite dans une zone de non droit, un ghetto au milieu de la ville, et dont elle ne sort tous les matins que grâce à son précieux laisser-passer pour aller travailler. Parmi les étrangers qui y sont rassemblés, elle à la chance de pouvoir sortir et aller travailler avec les vrais Français de souche, même si on lui en fait la remarque ! « Peut-être mais vous l’êtes moins que d’autres ! »
La troisième histoire traite à nouveau de l’accès aux soins de santé, un thème déjà présent dans la saison 1 de SOS Bonheur. « La souffrance est bien sûr une chose regrettable. Mais vous conviendrez que la souffrance de ceux qui sont en ordre est plus légitime et digne de confiance »
Une quatrième histoire parle du régime policier et de la manière d’arriver à des statistiques « zéro criminalité ». Le recours à des sociétés privées en sous-traitance qui gèrent des prisons privées est la solution proposée.
Cinquième récit, le plus noir de tous selon moi, qui prône le bonheur absolu, quitte à fermer les yeux sur le passé et ses dérives. « Tout va bien, vous n’avez à vous préoccupez de rien et surtout pas de ce qui est trop compliqué, votre gouvernement s’en charge pour vous, tout va très bien ». Le négationnisme n’est pas loin !
Enfin, dernière histoire de 18 pages où le gouvernement en place souhaite museler toute forme d’opposition, repousser les élections et pour ce faire imagine un assassinat en direct en en tirant tous les bénéfices auprès de l’opinion publique. « Votre bonheur sera son bonheur. Et soyez certains qu’il vous le garantira, quoi qu’il en coûte ! »
Le trait expressif et réaliste de Griffo, mélangé à des couleurs volontairement pâles de Florent Daniel, permet de planter le décor d’un monde triste. Volontairement Griffo n’a pas travaillé en couleurs directes comme il le fait actuellement, mais a dessiné au trait et à l’encre pour jeter un pont vers la saison 1 parue en 1988. Dans le même ordre d’idée, les voitures ne semblent pas très futuristes mais demeurent intemporelles, afin que le récit ne s’inscrive pas à un moment précis de l’Histoire.
J’attendais au tournant cette renaissance, je n’ai assurément pas été déçu, on y retrouve la magie noire créée par Jean Van Hamme et Griffo et reprise de main de maître par Desberg et toujours Griffo. Chapeau Messieurs, et vivement la conclusion (déjà !) dans le volume suivant.
Maroulf