Série: Toi au moins, tu es mort avant.
Auteurs: Sylvain Ricard, Myrto Reiss, Daniel Casanave
Editeur BD: Futuropolis
Une chronique BD: Génération BD
Dès son plus jeune âge, rebelle et frondeur, le Grec Chrònis Mìssios a déjà un sacré tempérament. Lors de la Seconde Guerre mondiale, il rejoint la résistance nationale pour combattre l'envahisseur. Puis quand la Grèce tombe dans le chaos de la guerre civile, on retrouve le jeune partisan au côté de l'armée démocratique. En 1946, Chrònis Mìssios, résistant communiste de 16 ans, est arrêté, torturé puis condamné à mort. Gracié de justesse, il verra sa peine commuée en perpétuité. Il va passer en tout plus de vingt ans de sa vie en prison et en déportation en tant que prisonnier politique avant d'être libéré en 1973 par l'amnistie générale décrétée suite à la chute de la dictature militaire.
Sylvain Ricard et Myrto Reiss se sont emparé du roman autobiographique "Toi au moins, tu es mort avant", écrit en langage populaire par Chrònis Mìssios en 1985 afin d'adapter le destin atypique de cet homme de convictions en bande dessinée. Un bel hommage pour Chrònis Mìssios ! Le livre se présente comme une lettre que Chrònis Mìssios adresse à un camarade disparu qui par "chance" est mort avant lui et ne connaîtra pas les"joies"de la prison et la fin du rêve communiste. Car ce qui frappe avant tout dans cet album, c'est l'incroyable force de caractère qui habite depuis toujours ce révolutionnaire. Malgré les emprisonnements successifs, les déportations sur des îles désertes de l’Égée propices aux exactions, les tortures endurées, il n'a jamais plié et renié ses convictions communistes en signant sa reddition. Son histoire est celle d'un engagement total, sans concession pour un idéal politique. Son courage et sa ténacité sont impressionnantes pour son jeune âge et force le respect.
Par l’entremise de ce récit, on découvre aussi une facette peu reluisante et assez méconnue de la Grèce Moderne. Ce livre fait aussi œuvre de mémoire.
En fin d'album, on trouve une chronologie sélective de la Grèce, de 1922 à 1982 ainsi que quelques jalons biographiques bien utiles car Chrònis Mìssios a tendance à circuler librement dans ses souvenirs en ponctuant son récits de nombreux allers-retours et la mise en dessin, toute en pudeur, par Daniel Casanave en noir et blanc coloré en sépia n'aide pas toujours à détecter le passage à un flash back.
Un album généreux, fort et intense qui ne laissera pas le lecteur indifférent.
Gladys