Comme tout conte de fée qui se respecte, l'histoire pourrait commencer par : il était une fois une jeune et jolie princesse prénommée Blanche qui était aimée de Gaspard, un charmant jeune homme, paysan de son état. Mais détrompez-vous, ce n'est pas une reprise de Blanche-Neige car très vite les événements vont se précipiter (bien que certaines références au dessin animé existent bel et bien : l'héroïne s'appelle Blanche, la sorcière du village apparaissant dans un miroir magique a un petit air bien connu de marâtre et le chasseur a fait place à un soldat servile). On se retrouve dans un Moyen-Age fantastique qui ne fait de cadeau à personne. A la mort de son père tué dans une embuscade, la jeune Blanche d'Entremonde est appelée à régner sur le monde d'En-Haut. La nouvelle reine doit faire face non seulement aux guerres intestines qui minent son royaume mais aussi à une menace plus sournoise au sein de sa propre famille. Quant au pauvre Gaspard, l’amoureux éconduit, il cherche vengeance auprès d'une sorcière et permet ainsi d'ouvrir la porte qui mène au monde des ténèbres. Ce monde d'En-Bas est dirigé par le séduisant prince Moldoror qui connaît lui aussi les affres des conflits familiaux suite à la prise de pouvoir de sa jeune sœur.
J'ai bien aimé l'idée du scénariste Dufaux de jouer avec ce parallélisme des destins que connaissent les deux principaux protagonistes de l'histoire : la princesse Aldora, complote contre son frère Moldoror tandis que Blanche est victime de sa mère et de son frère aîné bossu. Ils traversent la même galère quelque soit le monde auquel ils appartiennent.
Va-t-on néanmoins assister à une confrontation classique entre le bien et le mal ? Dufaux pimente son scénario d'une frontière poreuse entre les deux royaumes, malmenant ainsi la fragile frontière de cette dualité. Entremonde, le nom de famille de Blanche serait-il la solution ?
La couverture sous le trait de Munuera, qui offre une Blanche songeuse face à son choix (l'amour ou le pouvoir), est digne des somptueuses tapisseries qui recouvraient jadis les murs froids des châteaux de l'époque. Son dessin est fort proche de celui que l'on peut observer dans "Fraternity" avec une palette de couleurs assez sombres, un décor moins encré voire légèrement vaporeux sur lequel viennent s'incruster les personnages.
C'est avec beaucoup de curiosité que j’attends la suite de cette histoire annoncée comme un diptyque.
Gladys